Comme dit l'autre, il était une fois. Un homme. Dans un pays pauvre.
Un cultivateur dont la seule richesse était son champ. Dites-le cent fois et un troll vous sortira de la narine gauche.
Dans son champ, dans le fond, on s'en fout de ce qu'il cultivait, ce cultivateur. Des betteraves, des radis, des pousses de canabis, des embryons humains, des patates, des esclaves péruviens en batterie, peu importe.
Il s'en sortait assez bien aux yeux de son propre intestin grêle et de celui de sa femme, soit tout de même à eux deux près de 14 mètres de tripes. Chez eux, ce n'était pas le Ritz et sa femme, du reste, n'était pas Paris Hilton, mais c'était plutôt Minsk après le passage des gars en bottes et Radis Hideux. Mais bon, comme il ne connaissait ni l'hôtel ni la bombasse américaine à la bouche à ne pas tomber enceinte tout de suite, il s'en moquait.
Tout allait donc bien au pays des pauvres.
Mais une nuit, l'éleveur fit un rêve. Un truc de fou. Il voyait très nettement des petits faucheurs d'OGM locaux aller saccager et brûler ses terres. Bon, lui, les OGM, il n'en avait pas. Pas parce qu'il passait ses nuit sur MSN avec José Bové à rêver d'un monde sans rien de chimique, non, de toute façon il n'avait même pas de connexion haut débit, ni même d'ordi, le pauvre, mais simplement parce que c'était trop cher et qu'il ne voulait pas se compliquer la vie avec ça. En plus, de mémoire de pioche, on n'avait jamais eu le moindre faucheur (à part de coquelicots, en été parfois, mais ça ne compte pas, si ?) à plus de mille kilomètres à la ronde.(source image : http://www.lefigaro.fr/france/20060803.FIG000000113_les_faucheurs_volontaires_bravent_la_justice.html
Toujours est-il que "des hordes de salafistes intégristes, sortis des mosquées secrètes de Roissy" (dites-le avec l'accent vendéein, comme il l'a entendu dans son rêve, c'est mieux), sont venues à dos de moutons égorgés, si, si, juré, et ont tout saccagé.
Ni une, ni deux, il enfile ses rangers en peau de lapin et sa doudoune en poils de rat, et il fonce vers son champ, à la main sa seule arme : un rateau. Là, naturellement, rien. Les oiseaux, réveillés en plein chant pré-coïtal, font grise-mine. Ce soir-là, certains décidèrent de ne plus sortir dans le champ de ce vieux fou.
Décidé, notre homme organise, avec lui-même, des corvées de garde toute la nuit devant son champ. Il scrute le moindre mouvement de sourcils suspect. Le seul sourcil qui bouge, dans les environs, c'est celui de sa femme, toute seule dans son lit, en guise d'étonnement.
Au petit matin, son mari revient fourbu mais guilleret : il a parfaitement accompli sa tâche !
Elle demande quelle tâche Et, là, dans cet oeil qu'il voit tous les matins depuis tant d'années, il croit reconnaître la fourberie. Elle aussi ! Elle fait partie de la bande ! Ah, ils sont bien organisés ! Un espion à ses côtés ! Ni une, ni deux, il la vire ! A coups de taloches, elle dégage.
Bien sûr, elle hurle, proteste de son innocence, ne comprend goutte, mais ne peut rien y changer.
Il petit-déjeune et retourne très vite cultiver son champ. Il dormira lors de ses pauses, entre deux tours de garde, cette nuit.
Sa femme tentera de revenir, dans les jours qui suivent, après avoir suivi le sage conseil de sa soeur : "Laisse pisser, ça lui passera." mais la réaction de son homme est toujours plus violente.
Excédée, elle le traite de monomaniaque, et part avec toutes ses affaires chez sa soeur. Une procédure est engagée et le divorce prononcé dans les mois qui suivent.
Pendant ce temps, notre cultivateur, imperturbable et sûr de son fait, poursuit ses tours de garde.
Jusqu'au jour où, par un beau soleil d'été, une voiture, conduite par un beau jeune homme, visiblement aisé, passe devant son champ.
On lui propose de lui acheter son champ pour plus de dix fois ce qu'il lui rapporte chaque année. C'est-à-dire des clopinettes.
Devant les perspectives qui s'offrent à lui (enfin la retraîte, plus à se lever à point d'heure, plus à cultiver...) il hésite quelques jours et finit par accepter.
Il signe, encaisse le chèque et rentre chez lui. Seul. Plus de nouvelles de sa femme depuis le divorce. Il ne pense plus aux faucheurs, ils ont dû finir par se lasser. Il lui écrirait bien, à la traîtresse, mais elle fait partie de la bande et ils doivent voler d'autres honnêtes cultivateurs. Non, autant rester seul.
Il décide de s'offrir une semaine de vacances. Oh pas loin. Chez son frère qui habite à une heure de chez lui. Mais le climat change, quand on bouge, parait-il.
Tout se passe bien. Ils pêchent, causent, et ressassent. Ah le temps, ça...
Epuisé, il rentre chez lui.
Et là ! Horreur ! Son champ ! Des dizaines d'ouvriers, des murs qui se montent, des réseaux d'eau, de gaz !
Il va se renseigner, en s'étant calmé de son mieux, et il apprend que l'on veut construire une petite fabrique de *** en boîte ! Pile poile ce qu'il a cultivé pendant des années !
Mais il ne peut rien faire, ce champ ne lui appartient plus.
Dépité, il rentre chez lui, tête basse.
Il remarque une lettre passée sous la porte. Bizarre, il ne reçoit jamais de courrier et il n'attend plus de papier du notaire.
Il ouvre. C'est son ex-femme.
Elle lui apprend qu'elle est allée à la rencontre d'un jeune patron d'une petite société de *** en boîte. Il cherchait un endroit où construire une nouvelle fabrique. Elle a pensé à son champ. Et elle finit par ces mots :
"Au moins, vois-tu, tu avais raison : je suis avec eux. Si tu ne m'avais pas traîter ainsi, ton champ t'appartiendrait toujours."
Il prit une pelle et alla creuser un trou, loin de son champ, où il voyait bien son intestin grêle se décomposer.source image : http://ga.water.usgs.gov/edu/watercyclefrench.html
Morale : n'imaginons rien, vivons !
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