lundi 16 avril 2007

Au Pantéhon, selon Séb

Le Panthéon. Gorgone magnifique dévorant illustres et oubliés. Le froid sépulcral fouette ma laine dès le portique. Les mânes libérées de leurs tombeaux de suie m’accompagnent, me prennent par la main et me disent : voilà, je croupis entre ces murs. Evidemment pas de bois, ça ne tiendrait jamais et ça puerait. Alors, ils ont choisi la pierre. Triste, mais bon. Ah tiens, salut Victor – Jeune homme, me répond-il en massant silencieusement sa tempe droite et en pensant : c'est donc ce gringalet qui veut me piquer ma place en littérature ? Mouais...

Puis quelques esprits vaguement dérangés par ces jupes et ces strings qui m'accompagnent m'ouvrent leur intimité, poussent quelques portes, cachent quelques secrets dont tout le monde se branle, dans le fond. Non sans admiration, certains s'inclinent, comme à leur habitude apparemment, devant ce pendule qui siège au centre de l'édifice et qui suit la rotation de la Terre. Figure-toi, toi qui t'ennuies au point de me lire, que c'est le Panthéon, et donc la Terre, et non ce pendule, qui tourne ! Voilà, il a fallu des siècles à Homo Sapiens Sapiens

pour comprendre que sa misérable existence n'allait pas arrêter la course des étoiles et que, dans l'Univers, il n'est qu'une erreur, une bactérie qui a trouvé un chausson aux pommes sympa où se développer et se reproduire. Bien sûr, les quelques lignes expliquant la naissance de ce pendule ne soulignent rien de tout ça.

Un Révolutionnaire qu'on ne reconnaît pas, et de corvée de visitage ce dimanche-là, remercie ses petits copains de l'accueil et me présente, rien que pour moi, Voltaire, singeant Rousseau pour l'Eternité (ou inversement, précise-t-il, on ne sait plus à la longue), puis nous mène jusqu'à Pierre (Pierrot, pour les intimes) et Marie Curie qui ont, depuis le temps, fait et refait tous les calculs de leur décomposition respective et soupirent à chaque nouveau visiteur. Voilà, c'est ça l'Eternité, se répètent-ils. Bin putain.

On retrouve alors Hugo qui tape la discut avec les nègres de Dumas. Non loin de là, Zola, Jaurès et Malraux ont eu le temps de sympathiser. Ils commentent l'actualité que des bribes de conversations leur apportent quotidiennement. Eh oui, répète souvent André, n'a pas la carrure d'un général qui veut... Jean appelle tout le monde au calme quand des eurosceptiques belliqueux passent près de lui. Eternel recommencement.

Je me rapproche de Victor et, pour la forme, je récite Demain dès l'aube, sur l'épaule d'une belette. Le grand barbu ne relève pas mais nous suit du regard lorsque nous rejoignons, mon guide et moi, le martyr Jean Moulin. Incroyable chez moi : un signe de croix. Le respect pour le bonhomme m'y invite. Et je ne peux que me poser la question que tous ses visiteurs se posent : Et moi ? Qu'aurais-je fait ?

Puis vint le temps des déchirants adieux. Mon guide, las, tape dans le dos d'un vieux copain sans tête et sans-culotte et rejoint son tombeau. Allez, encore vingt ans avant que je retourne au taf.

Une petite pensée, en passant, pour tous les autres écrivains morts pour la Partie et pour le papa du Petit Prince.






On fait, ici et là, quelques croix, pour signaler les endroits où l'on verrait bien nos divins os moisir pour les siècles des siècles et, nos ventres réclamant quelques pitances, nous abandonnons l'idée de gravir les quelques 200 marches et des poussières qui nous séparent de l'espèce de donjon dont le guide a dit le nom exact en espagnol (et vu que j'y comprends rien, ce sera « donjon » pour cette chose ronde que vous verrez sur http://pantheon.monuments-nationaux.fr/thumb2/?q=70&w=308&h=308&table=m_photo&champ=photo_img&id=2521)


Séb.

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