
Une nuit l’âme en peine, il est quatre heures, sous la pluie, je suis seule dans ma ville d’amoureuse. Il est cinq heures, il est six heures, je marche, m’assieds, courre, saute dans les flaques, la pluie est fine, une caresse fraîche d’après l’orage. J’ai besoin d’être seule. Les pavés s’éveillent sous les chariots des marchands, les murs s’imprègnent des fournées des boulangers. Et je me couche sur la grande place, au milieu, là où des siècles de touristes, de badauds, de soldats et de mécènes ont marché avant moi. Mes yeux sont ouverts à en avoir mal. La pluie s’est arrêtée, je ne dormirai pas. Grand Papa, debout à côté de moi. Je me lève je ne rêve pas, il est là, salut puce et ma joue qui tremble sous son baiser tonique, ma tête qui s’échappe dans mon rire. Ses yeux bleus et son nez de boxeur, et un cochon en massepain qu’il a acheté pour moi, que je partagerai. Qui veut la tête, qui veut le reste. Short et marcel et polo comme je l’aime dans son jardin, et puis son bob. Il m’emmène au-delà de l’eau, il ne connaît pas si bien pourtant mais on montera pour regarder la vue de là-haut. La balustrade ou les marches, ou le petit banc caché derrière les arbres, on verra. Tu étais où pendant tout ce temps. J’étais là. Il me dit mais je n’y crois pas. Je l’ai vu partir, je l’ai vu souffrir, je l’ai vu s’en aller, et mon dernier au revoir. Mais il est là, c’est ça qui compte. Je lui dis ma vie te va, tu changerais quoi. C’était comment, tu reviens pour longtemps. Mon homme arrive, il n’a rien à faire là, s’en retourne. Il me dit qu’il n’est pas fait pour moi et je pleure dans ses bras. Tu m’as manqué oui, il te faut toi pour la canaliser, c’était plut drôle les œufs à la coque et ta tête qui sortait de sous les couvertures, comme maman quand elle s’endort. Il me dit qu’il comprend, mais qu’il n’y pouvait rien, qu’il n’y peut toujours rien. On marche, on redescend, le soleil monte, et nous voilà à la fontaine. Je lui dis que j’aurais voulu le connaître plus, qu’être la petite ça allait un temps mais que j’avais grandi, que j’aurais pu savoir, mais son humilité le fait rester muet, je suis si fière, et je lis dans ses yeux qu’il le sait. Je n’arrive pas à y croire.
Mais il doit repartir, je n’y changerai rien. A mes rêves, à là-haut, à plus tard.
CYRIELLE, 10/01/07
source image : http://anofor06.iecn.u-nancy.fr/main_fr.html
2 commentaires:
Je m'incline devant ce texte qui m'a fait monté les larmes aux yeux. Cyrielle ta voix est trop bien, j'adore je suis fan, ha que dis-je ? C'est une péninsule ! Euh... Biz'
Pareil pour moi Cyrielle... c'est beau, c'est triste, c'est nostalgique, bref, une vraie fable lacrimale qui fait du bien aux yeux et à l'âme. Continue dans cette voie et procure nous encore plein de belles émotions.
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